Dans le cadre de la loi sur la transition énergétique, la première phase d’installation des compteurs électriques intelligents Linky, développés par ERDF, devrait démarrer à l’automne prochain. L’objectif est d’équiper l’ensemble des foyers français du boitier communicant d’ici 2021. Ce sera la fin de 5 années de tests et micro-déploiements réalisés par le gestionnaire de réseau en charge du projet, ERDF ; 5 années qui ont vu des détracteurs de Linky prendre de l'importance pendant le déploiement du boîtier. Selon certaines associations, le compteur communicant émettrait en effet des radiofréquences dangereuses pour la santé. Décryptage.
En juillet 2014, la député Laurence Abeille, également membre de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, interrogeait dans le Journal Officiel la ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie au sujet des compteurs Linky. Elle demandait notamment à ce « qu'une étude soit menée préalablement au déploiement massif de compteurs intelligents, afin d'en évaluer les impacts réels pour les usagers en termes d'émission électromagnétique ».
A l’origine de cette préoccupation, des déclarations d’associations qui affirment depuis plusieurs années que Linky, le compteur électrique intelligent prochainement déployé par ERDF dans tous les foyers français, émettrait des ondes radio potentiellement cancérigènes. Qu’en est-il vraiment ?
Un boitier, trois technologies
Dans les faits, à la différence des systèmes de comptage communicant outre-Atlantique, Linky n’émet pas d’ondes radio, mais des ondes électromagnétiques à basse puissance. Le compteur est un équipement électrique qui produit donc, comme tous les appareils fonctionnant à l’électricité, des champs électriques et magnétiques. En pratique, le boitier communicant émet moins d’ondes électromagnétiques que de nombreux appareils électroménagers (radio-réveil, réfrigérateur, télévision, etc) et a peu près autant que l’ancien compteur Bleu Electronique. Il a ainsi une très faible influence sur son environnement immédiat et des laboratoires indépendants ont montré l’absence de danger pour la santé des ondes électromagnétiques émises.
Le compteur communicant diffère cependant des appareils électroménagers sur un point : il utilise le Courant Porteur en Ligne, aussi appelé « transmissions CPL ». Celui-ci consiste en la superposition du signal du compteur sur la tension du secteur, de 230 V en France. Cette technologie est notamment utilisée pour les Box Internet et peut entraîner des perturbations du réseau domestique lorsque les signaux émis sont à hautes fréquences, dans des gammes se comptant en plusieurs MHz. Les transmissions CPL utilisées par ERDF n’utilisent de leur côté que le domaine basse fréquence qui ne dépasse pas 90 kHz et n’émettent par conséquent aucune onde électromagnétique.
Enfin, le réseau de téléphonie mobile grand public, soit la technologie GPRS, est également utilisé par Linky afin de permettre au compteur de faire la liaison entre les différents concentrateurs. Pour cela, ERDF se sert des antennes relais de téléphonie mobile (GSM) déjà existantes. Celles-ci sont critiquées par différents groupes de personnes se déclarant « électro-sensibles », une maladie qui n’a pas encore trouvé de réel écho au sein des institutions médicales mondiales.
Normes sanitaires et mesures officielles
Les émissions électriques et magnétiques, ainsi que l’exposition du public aux champs électromagnétiques sont aujourd’hui strictement réglementées, à l’échelle européenne comme nationale par la mise en place de normes et de recommandations. Le système d’information Linky est soumis à quatre d’entre elles : la recommandation européenne 1999/519/CE et les normes françaises EN50470, EN55022 et EN50065-1. Pour s’assurer du respect de ces réglementations, plusieurs études ont été réalisées, par ERDF, mais aussi par des organismes indépendants.
Durant l’été 2012, trois syndicats régionaux, basés en Indre et Loire, à Lyon et en région parisienne (SIEIL, SIGERLy et SIPPEREC) ont effectué une campagne complète de mesure relative à Linky et à ses émissions. S’agissant de la technologie CPL, les résultats ont montré des valeurs très faibles, voire non significatives. Toujours selon cette étude, l’utilisation d’antennes GSM émet des ondes à un taux inférieur au seuil de prévention fixé par l’assemblée parlementaire du conseil de l’Europe (0,6 V/m). L’expertise conclut finalement à l’absence de risque sanitaire.
Aujourd’hui, des vidéos circulent prétendant pourtant prouver l’émission de radiofréquences inquiétantes aux abords des compteurs Linky. Des informations à prendre avec précaution. Ces vidéos sont en effet contestées. En cause : l’absence de méthode scientifique exposée par leur réalisateur. Les fréquences servant à la réalisation des mesures sont rarement explicitées et les résultats trouvés peuvent toujours être faussés par le champ électrique rayonné par le courant électrique, indépendamment du CPL de Linky.
Les conclusions de ces études amateurs confondent de plus de nombreux termes techniques, allant jusqu’à parler de champs radiatifs quand il s’agit en fait de fréquences électromagnétiques. Si la presse, manquant d’argument scientifique probant, ne relaie que très peu ces publications, ces dernières, par leur vocabulaire alarmiste, ont un réel effet sur la population et il convient de rappeler l’importance de l’esprit critique, en toute circonstance.