Selon de nouvelles révélations du journal Le Monde et de la cellule investigation de Radio France, les autorités françaises ont aidé Nestlé Waters à utiliser des filtres illégaux pour ses eaux minérales en bouteille. Ainsi l’État a préféré privilégier les intérêts du groupe agroalimentaire au détriment des consommateurs. Si le directeur général de la santé (DGS) évoque un simple cas de fraude, des ONG pointent un risque sanitaire.
D’après de nouvelles révélations publiées le 4 février par Le Monde et la cellule investigation de Radio France, les plus hautes sphères de l’Etat français, jusqu’à l’Elysée, ont aidé en toute connaissance de cause Nestlé Waters à utiliser des filtres illégaux pour ses eaux minérales en bouteille depuis au moins 2021.
L’exécutif a privilégié les intérêts de Nestlé au détriment des consommateurs
Les deux médias reposent leurs allégations sur plusieurs notes ministérielles, échanges de courriels, compte-rendus d’inspection des usines de la multinationale et résultats de prélèvements sanitaires. Ces dizaines de documents attestent que « l’exécutif a privilégié les intérêts de Nestlé au détriment des consommateurs en laissant le groupe suisse continuer à commercialiser une eau qu’il savait non seulement non conforme à la réglementation mais aussi à risque pour la santé », accusent les journalistes.
Une précédente enquête pointait déjà du doigt le groupe agroalimentaire
Le Monde, Radio France et Mediapart avaient déjà conclu, dans des enquêtes journalistiques publiées en janvier 2024, que le groupe agroalimentaire avait fraudé pendant quinze ans, vendant de l’eau en bouteille non conforme. La multinationale est donc coutumière des pratiques non règlementaires. Ce qui n’a pas empêché les plus hautes autorités françaises à continuer de la couvrir.
Des rencontres entre des représentants de Nestlé et ceux de l’Elysée
Le Monde et Radio France pensent que l’attitude de l’exécutif français est le résultat d’un puissant lobby de Nestlé, qui ferait également du chantage à l’emploi. Des rencontres ont eu lieu entre les représentants du groupe et ceux du gouvernement à plusieurs reprises. Ce que ne nient les deux parties. Mais elles parlent de réunions formelles.
Macron a entretenu des liens étroits avec la multinationale lorsqu’il était banquier d’affaires
Cependant, on ne peut pas omettre que Nestlé et Emmanuel Macron ont des liens très anciens. En effet, lorsqu’il était banquier d’affaires chez Rothschild & Cie, l’actuel président de la République a touché un million d’euros en menant une négociation pour Nestlé. La direction française du groupe lui a même proposé un poste. Cette ancienne relation doit interpeller. Elle pourrait expliquer la complaisance du locataire de l’Elysée vis-à-vis de l’entreprise.
Nestlé a reconnu avoir eu recours à des systèmes interdits de microfiltration
Nestlé, propriétaire des marques Vittel, Contrex, Hépar et Perrier, puise ses eaux minérales naturelles dans les Vosges et le Gard. En 2024, le groupe a reconnu avoir eu recours à des systèmes interdits de microfiltration pour garantir la sécurité alimentaire de ses eaux minérales, face notamment à des problèmes de contaminations bactériologiques. Il a ensuite dû payer deux millions d’euros pour s’éviter un procès, après une plainte déposée par l’association Foodwatch.
La DGS avait recommandé de suspendre les autorisations de Nestlé
Dans une note du 20 janvier 2023, le directeur général de la santé (DGS), Jérôme Salomon, recommandait de suspendre immédiatement l’autorisation d’exploitation et de conditionnement et d’embouteillage de l’eau pour les sites Nestlé des Vosges et du Gard. Il reposait sa requête sur un rapport de l’Anses sur l’utilisation de microfiltres inférieurs à 0,8 micromètre. Cette analyse concluait que l’eau en sortie de puits n’était pas microbiologiquement saine.
Pas un sujet de sécurité sanitaire, mais un sujet de fraude
Plusieurs autres experts et des ONG ont alerté l’exécutif sur les risques sanitaires que Nestlé faisait courir aux consommateurs. Interrogé par le Sénat le 23 janvier dernier, l’actuel patron de la DGS, Grégory Emery, indiquait pourtant que ce dossier n’était pas un sujet de sécurité sanitaire mais un sujet de fraude. Est-ce que le consommateur a été dupé ? Indéniablement (…) Est ce qu’il a été mis en danger ? En tant que directeur général de la DGS je réponds de manière explicite : « non », avait-il déclaré….