Greenpeace a lancé une opération de décryptage de la mécanique de décision de la politique énergétique française dont l’objectif est de mettre en lumière ce qui se joue dans les coulisses des décisions sur la politique énergétique.
Greenpeace montre pourquoi et comment le nucléaire est systématiquement choisi au détriment de l’intérêt collectif depuis près de cinquante ans sans que la population n’ait son mot à dire. À l'heure où le président de la République élu, François Hollande, a promis d'enclencher la transition énergétique du pays, et après l’éviction de Delphine Batho qui pilotait le débat national sur la transition énergétique, une question se pose : qui décide de la trajectoire énergétique du pays ?
Les pressions sur l’exécutif sont -organisées et puissantes : les industriels du nucléaire, les syndicats implantés dans ces entreprises, les conseillés formés dans nos grandes écoles, les élus qui bénéficient de la présence de sites nucléaires dans leurs circonscriptions… Tous exercent un pouvoir considérable sur la politique énergétique. François Hollande pourra-t-il y résister pour prendre la décision qui s’impose de fermer des réacteurs nucléaires et engager le pays dans une indispensable transition ?
D’ici à septembre seront diffusés quatre « épisodes » présentant les groupes de pression qui font la politique énergétique française. Le premier épisode centré sur les industriels du nucléaire est en ligne depuis ce matin.
Episode I : les industriels du nucléaire
Pour juger de l’influence des industriels du nucléaire, regardons le débat sur l’énergie. On aurait pu s’attendre à ce que tous les acteurs du secteur de l’énergie – renouvelables, efficacité des bâtiments, nucléaire, pétrole… – soient équitablement représentés. Mais cette approche est inacceptable pour les industriels du nucléaire qui n’ont aucun intérêt ni volonté à ce que les choses changent. Résultat : ils squattent massivement les instances du débat où ils sont surreprésentés. Par exemple, pour les débats en région, sur les 229 représentants des entreprises, 66 sont envoyés par la seule firme Areva, et 68 par EDF et ses filiales. Autrement dit, la représentation du patronat est trustée à près de 60% par des firmes activement engagées dans la promotion de l’énergie nucléaire. Les PME, les énergies nouvelles et le secteur de plus en plus important des économies d’énergie sont quasiment oubliés.
Au-delà de cet exemple, l’influence des industriels du nucléaire sur la politique énergétique n’est plus à démontrer. Prenons le cas d’EDF : nous avons une entreprise dont l’État reste majoritairement actionnaire et qui fait du chantage à son actionnaire en permanence (emplois, coût de l’électricité…). Sa situation de quasi-monopole lui donne une position dominante qui la place en quasi-décideur de la politique énergétique. Quelle est la marge de manœuvre du politique sur les choix stratégiques, les investissements, le prix de l’électricité ?
Et François Hollande ?
Le président de la République a fixé un cap pendant sa campagne : ramener la part du nucléaire de 75 à 50% dans notre électricité d’ici 2025. Pour y parvenir, ce sont 10 réacteurs qui devront être fermés d’ici 2017 et 20 d’ici 2020. Les annonces faites depuis son élection laissent penser qu’on ne prend pas ce chemin-là (fermeture de la centrale de Fessenheim et ouverture de l’EPR de Flamanville).
François Hollande aura-t-il le courage de ne pas se laisser imposer une politique énergétique comme ses prédécesseurs ? La loi de programmation énergétique prévue pour l’automne nous permettra de savoir si la volonté d’un président élu peut s’imposer face aux groupes de pression.