C’est une évidence que de dire que l’alcool représente un problème majeur de santé publique et un enjeu fondamental de sécurité routière. Il n’est pas inutile cependant de rappeler qu’un tiers des accidents mortels survenus sur nos routes sont provoqués par l’alcool. Ce qui en fait, depuis 2006, la première cause de mortalité sur les routes françaises.
Bien que 80 % des contrôles routiers effectués par les forces de l’ordre soient aujourd’hui des contrôles préventifs d’alcoolémie, le dispositif mis en place pour combattre l’alcool au volant reste trop faible : ces 11 millions de contrôles par an ne représentent en moyenne qu’un contrôle par conducteur tous les cinq ans ! La lutte pour réduire la mortalité due à l’alcool prend du retard et il est impératif de la compléter d’autres mesures.
La loi dite « LOPPSI II » votée en 2011 n’est toujours pas appliquée
L’intérêt de ce dispositif ne peut pourtant pas être remis en cause, dans la mesure où, après plus de 30 ans d’expérimentation en France, en Europe et à travers le monde, il est avéré que l’EAD, utilisé dans le cadre d’une condamnation pénale, permet une diminution de 40 à 95 % du taux de récidive d’alcoolisation au volant. Quand on sait qu’en 2012, 1151 personnes sont mortes des suites d’un accident de la route dans lequel l’alcool était impliqué, il ne semble pas envisageable de faire l’économie d’un outil en mesure d’apporter une solution technique au problème de sécurité routière que constitue l’alcool au volant.
Il est donc indispensable de mettre en œuvre une politique qui permette une véritable application de la loi décrivant la possibilité pour un magistrat de prononcer, comme composition pénale ou comme peine complémentaire, l’obligation pour l’auteur du délit de « conduite sous l’empire d’un état alcoolique d’équiper son véhicule d’un dispositif d’anti-démarrage par éthylotest électronique ».
Or, si l’on constate de façon flagrante un défaut d’application de cette loi – à savoir que ces peines n’ont jusqu’à présent jamais été prononcées – c’est que le dispositif qu’elle décrit est perfectible. En effet, pour qu’un juriste estime qu’il est approprié d’obliger un condamné à s’équiper d’un EAD, il faut qu’il soit certain que cette manipulation se fasse dans de bonnes conditions, ce qu’est censé garantir l’intervention d’un installateur agréé.
Le premier problème qui se pose à ce sujet est le manque d’agréments délivrés
Seuls deux professionnels disposent actuellement de cet agrément pour intervenir dans le cadre de la LOPPSI II pour tout le territoire français ! Ce qui est bien insuffisant pour favoriser la prononciation de ces peines. C’est pourquoi « 40 millions d’automobilistes » incite le gouvernement à procéder à une campagne promouvant, dans un premier temps, l’agrémentation des installateurs d’EAD auprès des professionnels afin d’étayer le réseau, puis, dans un second temps, encourageant les magistrats à prononcer les peines ayant recours à l’EAD.
Nous pensons également qu’il est nécessaire de combler certaines lacunes pour s’assurer de l’efficacité du dispositif. Tel que mis en place actuellement, l’EAD ne permet ni de rendre compte de la bonne utilisation de l’appareil par le condamné, ni d’évaluer le comportement de celui-ci. Or, comme tout dispositif électronique – même relevant de la plus haute technologie – l’EAD n’est pas exempt de risques en matière de contournement. C’est donc pour dissuader l’utilisateur de tenter de contourner le système et pour procéder à une surveillance accrue de son comportement au volant (rappelons que cet appareil s’adresse à des conducteurs ayant commis un délit), que « 40 millions d’automobilistes » préconise la mise en place d’un monitorage permettant de consulter les informations enregistrées par l’appareil. Ce serait la garantie que le dispositif joue son rôle de façon optimale, non seulement en termes de sécurité routière, mais aussi comme traitement thérapeutique en relais ou en complément des soins médicaux pour les conducteurs alcoolo-dépendants.
En outre, la mise en œuvre effective du dispositif dans le cadre judiciaire n’est coûteuse que pour le condamné : de 130 € par mois en location à 1800 € à l’achat, sachant que l’installation de l’EAD peut se substituer à l’amende encourue et permet de préserver le permis de conduire (et donc l’accès à une vie professionnelle et sociale).
L’application réelle et l’efficacité de la loi autorisant le recours à l’éthylotest anti-démarrage dans le cadre d’une composition pénale ou comme peine complémentaire sanctionnant le délit de conduite sous l’empire d’un état alcoolique ne sont donc soumises qu’à un effort de communication de la part du gouvernement et à la levée par la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) de quelques restrictions liées à la consultation des données recueillies dans la mémoire de l’outil. Rien de bien insurmontable donc, au regard des vies qui pourraient être épargnées.