Depuis plusieurs années, l’exposition à la lumière artificielle nocturne est suspectée d’augmenter le risque de cancer du sein, parce qu’elle dérèglerait l’horloge biologique humaine. Plusieurs études ont été réalisées à ce sujet, mais aucune n’a réussi à établir de façon certaine une relation de causes à effets.
Plusieurs travaux ont prouvé plus ou moins les conséquences néfastes de la lumière artificielle nocturne sur les insectes, notamment les papillons. Mais peu d’études se sont intéressés à leur impact sur les êtres humains. Celles qui ont creusé cette piste ont suggéré que ces sources de lumière nocturnes pourraient avoir un effet néfaste sur la santé de l’Homme.
Presque tous les Européens et Américains exposés à la lumière artificielle nocturne
On soupçonne notamment l’exposition à la lumière artificielle nocturne d’augmenter le risque de cancer du sein, en dérèglant l’horloge biologique humaine. Face aux différentes hypothèses émises à ce jour, une équipe Inserm à Villejuif s’efforce de démêler le vrai du faux. Dans un article publié sur son site, elle rappelle que près de 85 % de la population mondiale et plus de 99 % des Européens et des Américains passent la nuit sous un ciel pollué par la lumière artificielle. Ces statistiques sont issues de l’atlas mondial de la luminosité artificielle du ciel nocturne.
Pendant la nuit, les sources de lumière sont nombreuses
L’Inserm note que les sources de lumière artificielle sont nombreuses : lampadaires, panneaux publicitaires, éclairages de bureaux, ampoules de jardins, etc. Une exposition prolongée à ces sources perturbe le rythme biologique de 24 heures calé sur le cycle jour-nuit, appelé « rythme circadien ». Tous les êtres vivants sont soumis à cette horloge qui régule un grand nombre de fonctions biologiques telles que le système hormonal, dont le dysfonctionnement peut provoquer le cancer du sein.
L’OMS considère comme cancérigène la lumière artificielle nocturne
D’ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère l’exposition forte et prolongée à la lumière artificielle la nuit comme potentiellement cancérigène. Peu d’études à ce jour ont porté sur les populations exposées à la pollution lumineuse dans l’environnement général, mais des chercheurs suggèrent que les travailleurs de nuit sont les plus exposés.
La lumière artificielle nocturne incriminée dans une affaire de cancer du sein
S’appuyant sur cette information, une ancienne soignante à l’hôpital de la Caisse des Mines de Freyming-Merlebach ( Moselle) Bernadette W., a demandé et obtenu la reconnaissance de son cancer du sein. Celui-ci a été diagnostiqué en 2005, comme maladie professionnelle liée à son travail nocturne. Considérant tous ces antécédents, l’équipe Exposome et hérédité de Pascal Guénel, au Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations de Villejuif, s’est demandée si les perturbations du rythme circadien, en rapport avec l’exposition lumineuse nocturne, pouvaient avoir un effet sur le risque de cancer du sein.
Près de 2 500 femmes suivies dans une étude
Leur étude baptisée CECILE, menée en France, a analysé les données de 1 185 femmes atteintes d’un cancer du sein et 1 282 femmes témoins, réparties dans les départements de la Côte-d’Or et de l’Ille-et-Vilaine. Elle a consisté à analyser l’exposition à la lumière artificielle nocturne (sur la base des images satellites du programme Defense Meteorological Satellite Program) et à croiser les données avec les localisations des résidences des participantes.
Plusieurs facteurs pris en compte
L’équipe de recherche a également pris en considération la présence d’espaces verts à proximité des lieux d’habitation. Ces lieu pourraient avoir un impact sur l’incidence des cancers du sein en réduisant le taux de pollution atmosphérique ou en favorisant la pratique d’activité physique. Par ailleurs, les chercheurs ont intégré d’autres facteurs tels que le tabagisme, la pollution atmosphérique, la prise de traitements hormonaux, le niveau d’activité physique, la corpulence, le nombre d’enfants et la ménopause.
Un lien direct entre l’exposition à la lumière nocturne et le risque global de cancer du sein ?
Les résultats généraux obtenus n’ont pas permis de mettre en évidence un lien direct entre l’exposition à la lumière nocturne et le risque global de cancer du sein. Cependant, des analyses de sous-groupes ont révélé des tendances à la hausse du risque chez les femmes ménopausées et une association significative pour les cancers HER2-positifs. Face à ces conclusions, les chercheurs de l’Inserm jugent nécessaire de poursuivre les recherches dans ce domaine, en évaluant plus précisément les expositions à la lumière artificielle, y compris à l’intérieur des habitations.