Le Sénat a adopté vendredi de nouvelles mesures pour lutter contre la pénurie de médicaments. Le projet de loi prévoit un cadre législatif pour rationaliser la distribution et renforcer les sanctions financières contre les fabricants en cas de manquement aux obligations de détention de stocks de sécurité.
Dans le cadre de l’examen du budget 2025 de la Sécurité sociale, le Sénat a adopté, le vendredi 22 novembre, un article renforçant l’arsenal législatif pour lutter contre les pénuries de médicaments. C’est le même rituel depuis quelques années, à chaque projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).
Près de 4 Français sur 10 déclarent avoir été confrontés à une pénurie de médicaments
En effet, chaque année, le projet de loi contient des dispositions pour juguler la pénurie de médicaments, un phénomène qui a gagné en intensité depuis la crise sanitaire. En 2023, les difficultés d’approvisionnement se sont dégradées. Selon un rapport sénatorial de cette année-là, 37 % des Français déclaraient avoir été confrontés à ce phénomène.
L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a enregistré près de 5 000 signalements de ruptures de stock et de risque de ruptures de stock en 2023, contre plus 3 700 en 2022 et 2 160 en 2021. Parmi les médicaments en pénurie figurent les traitements anticancéreux, les antibiotiques, les médicaments pour les maladies cardiovasculaires, le paracétamol, l’amoxicilline ou encore l’Eurobiol.
L’ANSM et le gouvernement ont essayé de juguler la pénurie de médicaments
Pour limiter les pénuries, l’ANSM a mis en place plusieurs mesures en lien direct avec l’ensemble des acteurs impliqués. On peut citer : la répartition équitable des stocks de médicaments disponibles sur le territoire ; la libération pour certains médicaments en tension des stocks disponibles chez les industriels ; et l’obligation, pour ces industriels, d’élaborer un plan de gestion des stocks des traitements jugés essentiels.
De son côté, le gouvernement a présenté, en février 2024, une feuille de route 2024-2027. Parmi les engagements pris, on retrouve : l’interdiction des exportations par les grossistes-répartiteurs ; la relocalisation de la production d’une cinquantaine de médicaments essentiels en France ; et la mise en place des accords prix-volumes pour sécuriser davantage l’approvisionnement en amoxicilline. Mais ces mesures ne suffisent pas à enrayer les pénuries.
Un décret en Conseil d’Etat pour fixer les conditions d’utilisation des stocks de sécurité
Il faut donc appliquer un cadre législatif plus contraignant. Ainsi, conformément au projet de loi de de la Sécurité sociale 2025, l’ANSM pourra prononcer envers les établissements pharmaceutiques et les grossistes répartiteurs, une hausse du plafond des sanctions en cas de manquement à leurs obligations de détention de stocks de sécurité. Ce plafond passera de 30 à 50 % du chiffre d’affaires, et ce, dans la limite de cinq millions d’euros, contre un million aujourd’hui.
En septembre dernier, le gendarme du médicament avait infligé 8 millions d’euros de sanctions financières à l’encontre de onze fabricants pour n’avoir pas respecté leurs obligations de quatre mois de stock de sécurité. Outre ces amendes, un amendement prévoit un décret en Conseil d’Etat qui fixe les conditions d’utilisation des stocks de sécurité, en cas de rupture ou de risque de rupture. Il vise à assurer un approvisionnement approprié et continu du marché national.
Plusieurs causes à cette pénurie de médicaments
Notons que la France n’est pas le seul Etat concerné par les pénuries de médicament. À l’exception des pays producteurs, ce phénomène touche l’ensemble de la planète, en particulier les États-Unis, le Canada et les membres de l’Union européenne. En France, les tensions sur le marché du médicament s’expliquent en partie par le peu de fabricants présents sur le territoire et par la délocalisation des usines en Asie, principalement en Inde. D’autres facteurs comme la guerre en Ukraine et la hausse des prix de l’énergie impactent aussi la production.