Alors que les gilets jaunes revendiquent une meilleure répartition sociale, la télémédecine et son pendant, la téléconsultation, pourraient permettre de lutter contre les déserts médicaux.
Pour faire face aux déserts médicaux, la télémédecine et notamment la téléconsultation à distance sont des pistes prometteuses. Elles s’accompagnent toutefois de plusieurs contraintes, notamment un remboursement à 70%. À ce jour, seules quelques complémentaires comme Axa, Vyv ou Audiens remboursent totalement le reliquat.
Téléconsultation pour lutter contre les déserts médicaux
Le 17 novembre dernier, le Ministère de la santé établissait pas arrêté la carte des « zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins » – plus généralement appelées déserts médicaux – en France. « Chez nous, il faut quinze jours pour obtenir un rendez-vous, voire trois semaines. Parfois, on n’en a pas du tout. Mon médecin est parti à la retraite. Je me suis cassé les dents pendant un an avant d’en trouver un qui accepte de nouveaux patients », raconte John Billard, vice-président de l’Association des maires ruraux de France.
Alors que l’action contre la pénurie de médecins prend plusieurs formes – Emmanuel Macron s’était par exemple engagé à réformer le quota d’étudiants admis en seconde année d’études de santé – une autre piste est sérieusement étudiée pour assurer une couverture médicale à toutes les régions du pays : la téléconsultation. « La dématérialisation des documents utiles à la vie de tous les jours est devenue une habitude aussi pratique que répandue et rejoint une des premières attentes des citoyens », note Xavier Quérat-Hément, fondateur de l’association Esprit de Service France.
Il s’agit d’une consultation entre un professionnel médical et un patient par écran interposé, ce qui permet au premier d’exercer à distance. Avec l’avènement du dossier médical partagé et la facilitation de la téléconsultation, la lutte contre les déserts médicaux semble donc emprunter la voie du digital. « On arrive à répondre à 70-80 % des situations », assure Nicolas Wolikow, à la tête de du service de télémédecine français Qare. « Après, c’est la responsabilité du médecin de savoir s’il peut accepter cette consultation » précise-t-il.
Des obstacles persistent
« Plus de 90 % de ce qu’on fait en cabinet peut être réalisé en télémédecine, confirme le Dr Delphine Peduzzi. Des obstacles demeurent toutefois et rendent encore cette pratique marginale – en premier lieu la question du remboursement. Aussi, les représentants des médecins et l’Assurance maladie ont travaillé sur un accord pour rendre une consultation en visioconférence avec son médecin traitant remboursable au même titre qu’une consultation traditionnelle. Cela suppose néanmoins que ce dernier soit équipé pour ce type d’interventions.
Autre exigence mis en avant : le patient doit s’être physiquement rendu chez son médecin dans les douze mois précédant la consultation. « Une prise en charge de qualité implique un moment où le médecin puisse vous toucher » explique Annelore Coury, directrice déléguée à la gestion et à l’organisation des soins pour l’Assurance maladie. « Si vous appelez une plateforme commerciale pour un médecin en ligne que vous ne reverrez jamais, vous aurez peut-être une satisfaction sur le coup, mais ce ne sera pas de la médecine de qualité. »
L’apparition des premières offres d’e-santé
Pour l’instant, seuls quelques grands groupes de santé promettent des offres de téléconsultation dans un temps court – à l’image du groupe de protection sociale de la culture, de la communication et des médias, Audiens. Cette mutuelle s’est associée avec Médecin Direct et Deuxième Avis propose à ses assurés des services gratuits de téléconsultation avec un généraliste membre du Conseil national de l’ordre des médecins, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.
Audiens propose également une seconde consultation par voie postale du dossier pour les personnes atteintes de « maladies graves, rares, ou invalidantes ou confrontés à des décisions lourdes », dans un délai de deux à sept jours. « Nous travaillons avec le Centre médical de la Bourse (CMB) pour trouver des solutions de e-santé spécifiques. Par exemple, pour les métiers très physiques comme les circassiens, sur l’audition les musiciens ou encore sur les cordes vocales pour les choristes », souligne Éric Breux, directeur du pôle Entreprises & institutions du groupe.
Un champ d’avenir pour les mutuelles
« Nous sommes très à l’écoute du marché des startups, qui proposent des solutions innovantes » explique Éric Breux. Une position soutenue par Xavier Quérat-Hément. Avec l’évolution du monde et du numérique, mais aussi la pression des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple…) qui investissent de nouveaux marchés, les mutuelles s’adaptent pour conserver leur rôle. « Profitant de ce stock massif de data, les géants du numérique peuvent réaliser une analyse globale d’un individu et faire du curatif, voire du prédictif, en déterminant les pathologies qui pourraient toucher les individus », note-t-il.
Pour lui, afin de faire face à ces évolutions les mutuelles « multiplient les améliorations technologiques dans le but d’améliorer leurs performances et leurs services ». Or, il relève que « c’est dans le secteur de la e-santé que les mutuelles développent le plus de nouveaux outils, prêts à l’emploi ». A propos du partenariat lancé par Audiens, il note que « pour répondre à l’impératif de changement, [les mutuelles] doivent expérimenter pour s’adapter sans perdre leurs valeurs humaines, innover pour proposer des solutions au moindre cout et sans reste à charge et, in fine, mutualiser. »