Patch “anti-ondes” pour lutter contre les effets soi-disant nocifs du compteur Linky, bracelet “Power Balance”, régime détox… Depuis plusieurs années déjà, des mouvements utilisent les craintes ou les croyances des individus dans le but de s’enrichir. Sans aucune base scientifique, mais avec un impact sur la santé bien réel.
Une récente enquête Ifop pour la Fondation Jean Jaurès et l’observatoire Conspiracy Watch (Observatoire du conspirationnisme) montre que les théories du complot explosent en France : près de huit Français sur dix adhérant à au moins l’une d’entre elles. Selon Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch, les résultats du sondage « confirment que nous faisons collectivement face à un phénomène non seulement tangible, mais majeur, qui traverse toute la société et imprègne les représentations collectives à un degré préoccupant. » Cette tendance à chercher une vérité alternative se nourrit de la méfiance croissante de la population à l’égard des médias – en France seuls 24 % des Français pensent que les journalistes sont réellement indépendants.
Hélas, et paradoxalement, cette posture de méfiance a mis les Français à la merci des « fake news » (des informations délibérément fausses ou truquées) qui ont explosé sur internet depuis le début des années 2000. Le phénomène a pris tant d’ampleur que le Président français Emmanuel Macron a annoncé une loi pour lutter contre la désinformation lors de ses vœux à la presse le 3 janvier dernier. Il prévoit ainsi un recours pour saisir un juge et déréférencer ou bloquer les sites qui véhiculent ces mensonges. Les pouvoirs du CSA devraient également être accrus afin de lutter contre toute ingérence de médias étrangers en période d’élections.
Dans les colonnes du Monde, l’historien Emmanuel Kreis relativise : « Sur Internet, vous avez un nombre hallucinant de vidéos vous racontant n’importe quoi, mais, finalement, si vous cherchez une recette de cuisine, il y en a un nombre encore plus hallucinant. C’est une caisse de résonance pour tout. » Ces théories sont-elles si inoffensives ? Peut-être pas. Les « fake news » ne sont pas la liberté – liberté d’expression ou d’opinion. Elles sont généralement utilisées dans un objectif particulier : qu’il soit politique ou pécunier.
Une menace pour la santé
Dernièrement, les vaccins se sont retrouvés au cœur d’une controverse sans précédent alors que le caractère obligatoire de 11 vaccins, décidé par la ministre de la Santé Agnès Buzyn, fait débat en France. Les anti-vaccins critiquent leur teneur en aluminium, un lien supposé avec l’autisme ou le sur-risque de maladies liées à l’immunisation. Toutefois, de nombreuses études scientifiques ont démontré que les vaccins n’étaient pas dangereux pour la santé. Et pourtant, plus de la moitié des Français estime que le ministère en charge de la Santé et les laboratoires seraient « de mèche pour cacher au grand public la réalité sur la nocivité des vaccins », certains n’hésitant pas à qualifier les médecins de « tueurs d’enfants ».
Cette campagne de désinformation est loin d’être inoffensive. Selon l’Organisation mondiale de la santé, la vaccination permet d’éviter chaque année 2 à 3 millions de décès. En outre, cette défiance accrue envers les vaccins pourrait faire réémerger des maladies éradiquées. « C’est ce qui s’est passé avec la rougeole à la fin des années 2000, où la France a connu épidémie de grande ampleur », rappelle le Dr Lévy-Bruhl. On recense 20 décès liés à la résurgence de cette maladie. De même, 200 personnes mortes de la méningocoque C depuis 2011.
Le compteur communicant Linky d’Enedis (anciennement ERDF) a lui aussi fait l’objet d’une campagne complotiste. Cet appareil inquiète en effet une frange de la population, en raison de l’émission d’ondes électromagnétiques. Ses opposants déroulent un argumentaire très alarmiste sur le compteur, expliquant que les ondes émises sont cancérigènes, alors que dans les faits, il n’en est rien. Cette accusation se fonde sur une étude du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), qui a classé les ondes des radiofréquences dans la catégorie « cancérogène possible ». Le CIRC n’a toutefois jamais affirmé que les ondes étaient positivement dangereuses – mais simplement qu’il n’arrivait pas à prouver qu’il n’existait aucun risque dans l’absolu.
Aussi, l’ANFR a mené des études sur Linky afin d’en estimer le vrai danger. Les résultats révélés en mai puis en septembre 2016 ont établi que le compteur émet moins d’ondes électromagnétiques qu’une prise de babyphone ou qu’une plaque de cuisson à induction, 300 fois moins d’ondes qu’une télévision à tube cathodique. Comparaison éloquente, il émet 120 fois moins qu’un réfrigérateur et 800 fois moins qu’un grille-pain – et il ne nous vient pas à l’idée de se débarrasser de ces appareils du quotidien. Plusieurs associations de consommateurs, dont la très sérieuse UFC Que Choisir, ont également établi un fact checking invalidant les thèses avancées par les anti-Linky. Mais des fake news alarmistes continuent de le considérer comme une menace sanitaire, et le compteur compte encore de nombreux détracteurs.
Anti-Linky et complotistes : un business juteux
Si ces fausses informations ont connu un tel essor ces dernières années, c’est aussi parce que le business complotiste rapporte gros. On peut par exemple citer les aliments miracles. Certains sites promettent en effet de résoudre tous types de problèmes de santé avec un nouvel aliment aux propriétés paramédicales exceptionnelles. La fiabilité scientifique de ces produits est quasi systématiquement remise en cause par la science, mais les annonce continuent à promettre monts et merveilles.
Si cette nouvelle forme de superstition est plutôt inoffensive en général, elle permet en revanche de générer d’importants profits. Mais des cas peuvent être plus graves : les sites qui promettent de résoudre des maladies par l’alimentation sont eux plus dangereux, car ils pourraient inciter un internaute à ne pas suivre de traitement médical approprié, favorisant une méthode perçue comme « douce », mais en réalité inefficace.
On trouve aussi toute une gamme de produits « détox » censés purifier nos corps des toxines. Edzard Ernst, professeur émérite en médecines complémentaires à l’Université d’Exeter, en Grande Bretagne rappelle qu’il existe un seul type de vraie détox : « les traitements pour les personnes souffrant d’addictions graves aux drogues ». Les autres produits sont vendus par des « charlatans », poursuit-il. Si des toxines s’accumulent dans votre corps et qu’elles ne s’évacuent pas d’elles-mêmes, « c’est que vous êtes mort, ou avez besoin d’une intervention médicale de toute urgence », ironise-t-il.
Les ondes électromagnétiques ont elles aussi donné lieu à de nombreuses arnaques, qui surfent sur les peurs de citoyens induits en erreur et autres malades imaginaires. Ainsi, on trouve toutes sortes de gadgets pour s’assurer que son environnement de travail, son véhicule ou son domicile sont « sains », bien souvent vendus à des prix élevés : le Face Shield – un voilage de visage anti-ondes ressemblant étrangement à un filet d’apiculteur, la Capuche Ray Shielding – version 2.0 d’un voile religieux, ou encore la cage de Faraday, sorte de moustiquaire anti-ondes pour la bagatelle de 1400 euros.
Quand on se pose des questions sur sujet, on peut déjà regarder s’il y a un consensus chez les scientifiques. Ça peut aider à y voir plus clair, que ce soit dans le domaine de la santé ou pour d’autres débats plus sensibles :
http://wiki.reopen911.info/index.php/Cause_de_l%27effondrement_de_la_3ème_tour_du_WTC
L’obscurantisme a un bel avenir devant lui !